Mares et implantations urbaines

Territoire
Commune de St-André-de-l’Eure

Description
Pendant des millénaires l’approvisionnement en eau constitua le frein le plus puissant à toute implantation urbaine d’importance sur les territoires de plateau. La majorité des villes anciennes du département est ainsi située en vallée, au contact direct de fleuves ou de rivières, parfois même à faible débit comme l’Iton, le Rouloir ou la Bonde. La ville de Saint-André-de-l’Eure lutta longtemps pour accroître la capacité de ses réserves et faciliter leur accès. Sous le Second Empire, la municipalité lança une campagne de grands travaux hydrauliques. La mare des Epignoches, appelé aussi « Grand réservoir » fut considérablement agrandie avec le creusement de trois bassins d’une capacité de près de 10 000 m3 chacun (la carte postale ancienne et la photo montrent leur aspect vers 1900 et aujourd’hui). Ces travaux de collecte furent complétés par la construction de plusieurs fontaines municipales dont la plus emblématique trône sur la place face à l’église (cf. photo 3). Mais l’accès à l’eau restait malgré tout problématique. Seuls les captages récents et la campagne d’adduction d’eau du XXème siècle permirent de libérer la ville de cette contrainte. Pour ceux qui souhaitent en savoir plus, lire l’article « Saint-André sous le Second Empire » de Claude Eckendorf et Christophe Augereau, accessible sur le site officiel de la commune de Saint-André (www.ville-st-andre-eure.fr).

 

Mare et bassin versant

Territoire
Commune de Chaise-Dieu-du-Theil

Description
Sur les reliefs insensibles des plateaux de l’Eure, l’implantation des mares, pose souvent question. Ainsi cette grande mare entre forêt et pâture s’inscrit sur la ligne de crête séparant les vallées de l’Avre et de l’Iton et bénéficie d’un bassin versant très limité. Une nature favorable des sols et le jeu des microtopographies, notamment celles créées par l’homme (fossé, talus, excavation …), prennent alors toute leur importance.

Cette indépendance des mares par rapport aux axes de ruissellement naturels expliquent l’essor exceptionnel du nombre de mares creusées avant le XXe siècle. Chaque établissement humain pouvait se doter du nombre de mares nécessaire à ses usages pour peu qu’il dispose de l’énergie nécessaire à leur terrassement.

 

Ruissellements et rupture de passage d’eau

Territoire
Commune de Graveron-Semerville

Description
La mare de Matréaux est une belle et vaste mare communale : une surface d’eau de près de 1 000 m2 sur 2 700 m2 d’assise foncière (photo 1). Entourée d’arbres et utilisée comme halte pique-nique, elle est située au milieu de l’espace agricole, sur un passage d’eau naturel qui lui assurait une alimentation régulière.

Mais depuis quelques années, elle connaît des variations de niveaux d’eau marquées : 2010 l’a vu totalement sèche et enherbée tandis que 2012 lui rend ses niveaux d’eau anciens. Cette situation s’explique par la variation des pluviométries annuelles, mais accentuée des conséquences d’une urbanisation de l’amont. Le passage d’eau naturel est partiellement rompu (cf. schéma 2). Les conséquences sont significatives : des inondations temporaires et partielles des habitations qui obligent la commune à créer, après coup, un ouvrage hydraulique à l’amont du lotissement (photo 3).

Cette situation problématique aurait cependant pu être anticipée : en empêchant l’urbanisation du fil d’eau naturel et en intégrant celui-ci à la conception des espaces publics paysagers. Une approche intégrée associant infrastructures hydrauliques et paysagères favorise souvent un cadre de vie adapté aux pratiques récréatives de plein air locales. Elle permet également l’affirmation de supports particulièrement favorables à la préservation de la biodiversité locale.

 

La mare de Neuville déborde

Territoire
Commune de Mousseaux-Neuville

Description
La situation que connaît la mare de Neuville illustre parfaitement les conséquences ultimes de l’abandon du semis de mares hérité de l’économie paysanne d’avant 1900. Le rebouchage des petites mares privées et l’imperméabilisation progressive du hameau par ses routes, ses toitures, ses terrasses ou ses allées de garage entraînent un accroissement progressif mais continu des quantités d’eau pluviale à gérer. La grand’mare du hameau reste le dernier réceptacle de tous les ruissellements. Mais son emprise foncière n’augmente pas et sa situation en point bas empêche tout écoulement par surverse.
Les inondations hivernales de 2013 et 2014 sont donc moins le signe d’une fatalité climatique qu’une injonction à réinventer une économie partagée de gestion des eaux pluviales. Appliquées à un hameau à dominante résidentielle, les solutions techniques sont simples et relèvent de l’hydraulique douce : noue, fossé, tranchée drainante, mare, talus et haie … Leur mise en œuvre suppose un minutieux travail de reconnaissance du territoire local pour identifier emplacement et volumétrie. A la collectivité locale revient le rôle de chef d’orchestre, commandant les études, réglementant les rejets privés autorisés sur l’espace public et organisant les conditions de réalisation des ouvrages nécessaires.

Mais la particularité du conseil fourni ici par le CAUE27 est aussi de dépasser la réponse au strict problème fonctionnel pour l’inscrire dans un projet global d’amélioration du cadre de vie faisant la part belle à la valorisation de la biodiversité locale et la qualité du cadre paysager. Si le projet en devient plus complexe, il est potentiellement moins couteux et favorable à une appropriation locale plus pérenne.

 

La « Nette Mare » et autres toponymes

Territoire
Commune de Claville

Description
A la surface des plateaux karstiques de l’Eure, la présence de l’eau a toujours représenté une « anomalie » géographique suffisamment remarquable pour marquer les mémoires. Les mares ont constitué ainsi des repères physiques puissants qui ont traversé le temps. Aujourd’hui, la carte IGN du territoire d’une commune de plateau comme Claville présente ainsi près de 15 toponymes liés au mares, soit plus du quart des toponymes présents. Le terme « mare » y apparaît en majorité, complété de noms de propriétaire ou de lieu (« Mare Bifau », « Mare du Prémule », « Mare Chaneuse »), ou de qualificatif descriptif (« la Mare Neuve », « la Grande eau ») , topographique (la « Grand Mare », « la Mare en Ville ») ou fonctionnel (les Routis, le Routoir, « le Routoir aux Moines »). »La Nette Mare » entre dans cette dernière catégorie. Sous l’appelation plus commune de « mare nette », elle fait référence à un type de mare présent dans chaque implantation humaine de plateau. Elle désigne la mare réservée au prélèvement de l’eau de consommation humaine. Particulièrement précieuse, elle faisait l’objet de toutes les surveillances pour limiter la pollution par les animaux ou par la décomposition de matières végétales. On peut l’imaginer proche de l’habitation et certainement clôturée.

 

La « Mare de Ville »

Territoire
Commune de Quittebeuf

Description
Les mares ont fourni de multiples toponymes aux communes rurales des plateaux de l’Eure. L’un des plus original est celui de la « Mare de Ville » présent à Quittebeuf, similaire à celui de la « Mare en Ville », présent lui sur la commune de Claville. Ces deux appellations désignent des grandes mares en centre de village.

L’utilisation inhabituelle du mot « ville » est un rappel du parler normand rural qui réinvestissait, à l’échelle du seul territoire communal l’opposition lexicale ville / campagne. « Ville » désignait alors le village, par opposition à « campagne » qui désignait l’espace agricole, nu et vide, dédié aux grande cultures. On retrouve également cet usage dans le toponyme « Tour de Ville » qui désignait sur la commune de St-Aubin-d’Ecrosville, les forrières qui séparaient l’espace habité (maisons, jardins et pré-vergers), des plaines cultivées.

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